Il y a tout d’abord une segmentation géographique majeure à effectuer afin de comprendre le fonctionnement des systèmes ferroviaires asiatiques, entre l’Asie mineure, l’Asie centrale et l’Asie du Sud-Ouest, relative aux différentes périodes coloniales qu’ont connues ces pays, généralement par l’Angleterre, la Russie à l’époque soviétique et dans une moindre mesure, la France. La période de décolonisation et de libération des peuples n’a pas permis de pouvoir conserver dans tous ses pays les systèmes ferroviaires déjà plus ou moins bien installés.

Les chemins de fer indiens : un modèle

Un des principaux systèmes ferroviaires du monde est représenté par les chemins de fer indiens, hérités en partie de la période coloniale anglaise. Le train fait entièrement partie de la culture du pays et est complètement intégré dans les différents modes de transport que choisissent les indiens. L’image d’Épinal généralement admise par les étrangers est constituées de voitures pleines avec des passagers voyageant dessus, mais cela n’est plus une réalité. Le train est, de fait, un moyen de transport extrêmement populaire et très pratique, qu’il s’agisse de longues ou de courtes distances, afin de rejoindre des régions planes comme plus difficiles d’accès.

Il existe un certain nombre de liaisons ferroviaires internationales qui relient l’Inde au Népal, au Pakistan et au Bangladesh. Le train qui relie l’Inde au Pakistan est le Samjohta Express, qu’il est possible de prendre depuis Delhi ou Amritsar (principale ville indienne située non loin de la frontière) jusqu’à Arrati/Wagah (villes frontalières) avant de rejoindre Lahore, au Pakistan, située à 20 kilomètres de là. S’arrêter à la frontière permettra de regarder la cérémonie d’ouverture et de fermeture de la frontière, qui vaut en elle-même le détour.

Un second moyen de rejoindre le Pakistan depuis l’Inde en train est de prendre le train Thar Express, ouvert en 2006, qui relie Jodhpur (Inde) à Karachi (Capitale du Pakistan), en passant par la ville frontalière de Munabao. Il s’agit d’un train de nuit dans les deux sens, étant donné que le trajet dure environ 25 heures.

Depuis Delhi, une liaison directe rejoint le Népal et la ville de Kathmandu en passant par les villes de Gorakhpur et Bhairawi/Sunauli. La liaison dure 15 heures pour un dernier trajet en bus de 3 heures, mais cette liaison est très populaire chez les népalais qui travaillent en Inde. Il est également possible de commencer ce trajet à Varanasi, où travaillent de nombreux népalais également, comme à Manali ou Leh (Ladakh).Enfin, il est également possible de se rendre au Bangladesh depuis l’Inde par le rail, d’autant plus facilement qu’une nouvelle ligne a été ouverte et qui relie Calcutta à Dhaka en avril 2008.

Les modalités de réservation pour les trains en Inde sont assez spéciales et pas forcément faciles d’accès pour les étrangers, d’autant que pour toute procédure qui sort un peu de l’ordinaire, il est souvent nécessaire de posséder un numéro indien sur place, comme par exemple lors d’une réservation en ligne d’un ticket. Il existe néanmoins des astuces pour pouvoir se passer de ces autorisations en demandant une dérogation aux services ferroviaires, mais la démarche est loin d’être intuitive.

Les tickets peuvent être au format papier imprimés sur du papier spécial si on les prends directement à la gare, mais il est également possible de les imprimer de chez soi voire même, grâce au site cleartrip qui a un partenariat avec Indian Railways et qui permet de prendre des billets pour les non-indiens, d’avoir son billet directement sur son mobile, notamment grâce à l’application Passbook, au même titre que la SNCF. Les réservations sont affichées sur chaque voiture et sont nominales, et cela permet notamment d’être sûr de ne pas se tromper de voiture lors de l’embarquement. Elles affichent notamment le nom, l’âge et le genre de chaque passager : cela permet aussi au contrôleur de vérifier que la personne assise correspond bien au détails de la réservation (pour l’âge et le genre). Le système fonctionne parfaitement et cela permet également de s’assurer que personne ne prenne une place déjà réservée.

Il existe également en Inde un système de places assez compliqué mais qui présente certaines innovations très intéressantes, comme par exemple le Foreign Tourist Quota, qui réserve, sur les principaux trajets touristiques, un certain nombre de places destinées aux ressortissants étrangers et aux détenteurs de pass IndianRail. Cela est très utile pour les touristes qui ne peuvent se permettre de réserver une place à l’avance en raison des restrictions du système (uniquement les cartes bancaires indiennes sont théoriquement acceptées). Ainsi, même quand un train est complet, il est théoriquement possible de s’adresser au guichet à partir de la veille du départ pour obtenir une des places qui correspond au Foreign Tourist Quota. Il est obligatoire de réserver ces places au sein des agences et elles ne sont pas nombreuses, mais cela permet de dépanner sérieusement les touristes qui sont dans le pays.

De la même manière, dans la plupart des gares du pays, il existe des “Tourist Reservation Offices” qui permettent au touristes de pouvoir s’adresser en anglais à l’administration ferroviaire pour la réservation de billets ou toute réclamation. L’avantage est que ces guichets ne sont destinées qu’à la seule utilisation des touristes et cela permet d’éviter de faire la queue pour des requêtes simples, mais surtout d’éviter de faire la queue pendant une longue période pour finalement être coincé parce que personne ne parle anglais et être bloqué, comme cela peut arriver plus facilement en Russie.

L’Asie du Sud-Est possède un réseau ferroviaire limité mais fonctionnel

La Thaïlande n’a pas su suivre le même chemin que l’Inde en terme de développement de réseau ferroviaire, notamment en raison d’un territoire organisé de manière plus linéaire et plus auto-centré autour d’une mégalopole, Bangkok, alors que l’Inde est par nature plus organisée autour de diverses régions qui ont chacune une importance certaine, même si Delhi reste là encore le centre économique et institutionnel du pays — la décentralisation y est toutefois beaucoup plus avancée par nature. Ainsi, que ce soit pour des raisons économiques, institutionnelles ou touristiques, la Thaïlande n’a pu ni se doter d’un système ferroviaire complet et certaines des lignes construites durant la période coloniale n’ont jamais vraiment été utilisées et se retrouvent aujourd’hui à l’abandon.

Toutefois, il faut noter que le système ferroviaire thaïlandais est remarquablement bien organisé et de loin le plus performant de toute l’Asie du Sud-Est. Les voyages sont confortables à des prix abordables avec des horaires plutôt respectés. Le trajet le plus populaire est celui qui rejoint Bangkok (logiquement le centre ferroviaire du pays) et Chiang-Mai dans le Nord, et ces deux gares constituent ainsi les deux gares les plus importantes du pays.

De nombreuses liaisons internationales relient la Thaïlande à ses pays frontaliers, bien que la plupart de ses derniers n’aient pas de système ferroviaire en marche Il est ainsi très simple de rejoindre Ventiane (Laos), Kuala Lumpur (Malaisie), Singapour (en 48 heures), etc. Par exemple, pour le Laos, un train de nuit relie les deux capitales tous les jours, le train s’arrêtant néanmoins à la frontière, à 13 kilomètres de Ventiane, où il est alors possible de prendre un taxi pour rejoindre la ville. Ce trajet a été ouvert en 2009 et est donc plutôt récent, utilisant le nouveau “Friendship Bridge” (Pont de l’Amitié) qui traverse le Mékong pour relier la Thaïlande au Laos.

A noter qu’il est théoriquement possible de se rendre à Bangkok uniquement par voie terrestre et quasiment uniquement par train depuis Paris, en effectuant le trajet suivant : Paris — Moscou (direct), Moscou — Pékin (Transsibérien direct), Pékin — Hanoï (direct), Hanoï — Saïgon (direct), Saïgon — Pnom Penh (direct par bus, étant donné qu’il n’y a pas de train intérieur au Cambodge) puis Pnom Penh — Bangkok (bus jusqu’à la frontière puis train). Ce trajet nécessite au minimum 16 nuits de trajet, en comptant les correspondances.

L’Asie du Sud-Ouest, un réseau ferroviaire limité et peu fonctionnel

Après l’Inde et son système ferroviaire très avancé, la Thaïlande, système fonctionnel mais limité (ce qui est également le cas de l’Ouzbékistan, traité précédemment), il nous reste ici à traiter du dernier cas qui nous intéresse, à savoir un pays avec un système ferroviaire existant mais peu fonctionnel. Nous n’aborderons pas le sujet des pays qui n’ont pas et ne développent pas non plus de système ferroviaire. L’exemple d’un système ferroviaire limité que nous traiterons ici sera l’Iran.

En effet, l’Iran possède un système ferroviaire plutôt étendu dans le pays et qui permet de rejoindre, théoriquement, plutôt facilement toutes les grandes villes du pays. Ceci-dit, le manque de maintenance des infrastructures (dû essentiellement aux sanctions internationales qui touchent le pays et l’empêchent de disposer de tous les matériaux nécessaires, plaçant le système ferroviaire en bas de ses priorités) conduit les trains à circuler plus rarement et avec une ponctualité plus que hasardeuse. Ainsi, année après année, le système ferroviaire iranien se dégrade pendant que se développent les trajets en bus, qui sont aujourd’hui le principal moyen de transport “inter-ville”. Les gares routières sont très bien organisées et les bus nombreux en plus d’être ponctuels, ce qui rend les trains de moins en moins utilisés.

L’Iran possède de plus une liaison internationale par train qui permet de rejoindre la Turquie et Ankara à travers le “Trans-Asia Express”, pour un trajet de 3 jours et 2 nuits. Ce trajet menait à Istanbul mais a été modifié en 2011.